Questions de communication, n°22/2012, Patrimonialiser les musiques populaires et actuelles
EAN13
9782814301306
ISBN
978-2-8143-0130-6
Éditeur
Presses Universitaires de Nancy
Date de publication
Collection
Questions de communication • série actes
Nombre de pages
412
Dimensions
24 x 16 x 2 cm
Poids
655 g
Langue
français

Questions de communication, n°22/2012

Patrimonialiser les musiques populaires et actuelles

Presses Universitaires de Nancy

Questions de communication • série actes

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Extraits de l'introduction, par Philippe Le Guern:

Que Karl Marx me pardonne, mais il se pourrait bien qu'« un spectre hante le rock »... Le spectre du rock qui n'en finit pas de hanter le rock lui-même, quelque chose d'équivalent à ce que Simon Reynolds (2012) a appelé en une formule saisissante « l'empire du rétro » à propos de la pop actuelle, et qui le conduisit même à supplier qu'on laissât enfin Kurt Cobain reposer en paix, tant il est clair que le désir mortifère qui sous-tend la compulsion rétromaniaque est à l'exact opposé de la pulsion de vie – et de transgression – sur laquelle le rock a construit sa légende et sa puissance de contamination sociale.

En effet, depuis le début des années 2000, le retour spéculaire du rock sur lui-même semble être devenu la caractéristique majeure d'une culture qui valorise la nostalgie, le recyclage et l'autocitation (à grand renfort de samples), qui multiplie les mausolées dédiés à sa propre gloire et dépose dans la crypte du Rock and Roll Hall of Fame ou du Musée du rock situé au cœur du complexe culturel et commercial de Las Arenas à Barcelone les fantômes des Beatles ou d'Elvis. Des fétiches – guitares, costumes de scène, etc. – y sont présentés à la dévotion des admirateurs: ils y interrogent souterrainement notre rapport à la marchandise (mais pourquoi diable le rock serait-il soustrait au regard de Karl Marx?) et le lien en apparence paradoxal du rock au capitalisme. (...)

La question centrale que cette livraison de Questions de communication entend explorer est donc la suivante: quelle(s) signification(s) accorder à ce qui apparaît comme un phénomène sans équivalent si on en juge par son ampleur et par la multiplicité des formes et dispositifs qu'il inspire et que j'appellerai l'obsession patrimoniale? Cette obsession est-elle le symptôme de mutations anthropologiques, qui mettraient notamment en jeu nos conceptions de la modernité, de l'art et des valeurs dont celui-ci est porteur (authenticité, autonomie, etc.), et de la culture en régime numérique (Kirby, 2009; Le Guern, 2012)? De façon plus précise, la question qui intéresse ici renvoie à différents niveaux d'analyse qui interagissent:

- que considérons-nous ou que constituons-nous en patrimoine rock? Et d'ailleurs, qui est ce « nous » apte ou habilité à saisir et faire signifier ce patrimoine? Le « nous » des amateurs? Le « nous » de la puissance publique? Le « nous » des experts en histoire culturelle ou en muséographie?

- à quels dispositifs avons-nous recours lorsque nous mettons en scène cette mémoire du rock?

- partant, quelle(s) histoire(s) du rock élaborons-nous à partir des traces, indices, emblèmes que nous recueillons et sélectionnons?

- enfin, existe-t-il une façon idiosyncratique de faire cette histoire du rock? Autrement dit, l'histoire du rock et sa patrimonialisation sont-elles les mêmes vues de France, d'Angleterre, des États-Unis ou d'ailleurs?
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